char761C’est entre le 8 et le 12 novembre 1944 que Moyenvic a été libéré de l’occupation nazie par l’armée américaine. Nous avons sur ce site fait le récit de cette terrible bataille qui fit près d’un millier de morts en quatre jours dans notre village. ( cf article "8-11 novembre 1944" dans la même rubrique) Nous voudrions aujourd’hui mettre en lumière un épisode singulier de ce conflit : l’entrée en guerre, sur la ligne de front des premiers soldats afro-américains. A l’époque le contexte est encore celui de la ségrégation. Au début de la seconde guerre mondiale, les Afro-américains n’ont pas le droit de monter au front et ils sont cantonnés à des tâches d’intendances (cuisiniers, agents d’entretiens...) Au fur et à mesure de l’avancement du conflit, les lourdes pertes subies par l’armée US convainquent les dirigeants américains d’ouvrir les rangs de ses troupes aux noirs. La création d’un bataillon entièrement constitué de soldats de couleur témoigne du racisme ambiant. Ce sera le 761st Tank Bataillon, dont l’insigne comportait une panthère noire.black_panther


Le hasard a voulu qu’après avoir débarqué en Angleterre et traversé la France cette unité soit partie au combat depuis Saint-Nicolas de Port où elle stationna du 26 octobre au 8 novembre. Ses premiers faits d’arme, elle les réalisa à Moyenvic lors de la bataille évoquée plus haut dans cet article.

36 officiers et 593 hommes du rang noirs participèrent donc à la libération de Moyenvic. On notera parmi ces soldats l’attitude d’un en particulier aux abords de Salival : Warren Crecy.

Après que son tank fut détruit par les tirs ennemis, il prit les commandes d’un autre véhicule armé seulement d’une mitrailleuse calibre .30 afin de liquider les servants du canon qui avait détruit son tank. Sous un feu nourri, il s’occupa ensuite des observateurs d’artillerie qui dirigeaient les tirs qui maintenaient l’infanterie américaine clouée au sol.

crecyLe lendemain, Crecy vit son Sherman (tank US) s’embourber et s’extirpa du char sous le feu des Allemands. Comme l’infanterie américaine était de nouveau clouée au sol et que l’ennemi en profitait pour contre-attaquer, il tint l’adversaire en respect avec le calibre .50 du char pour permettre aux soldats de battre en retraite.

Plus tard, le même jour, il s’exposa à nouveau aux balles des Allemands afin de nettoyer des nids de mitrailleuses et une position anti-char. On eut fort à faire pour le séparer de sa mitrailleuse à la fin de cette journée. Warren Crecy avait été marqué par le décès de son bon ami Horatio Scott, il combattait avec rage. Tout comme Rommel et Guderian, il ne craignait pas de sortir le haut de son corps de la tourelle. Leonard Smith : « Il n’avait peur de rien. Il disait : Dites-moi où ils sont et je vais les avoir ! » Johnnie Stevens raconte comment il s’est attaqué seul à trois chars allemands par des manoeuvres habiles de déplacements. Il mérite pleinement son titre « d’homme le plus craint » de la 761st. Ses compagnons pensent qu’on aurait au moins pu lui décerner la Médaille d’Honneur !

Après la guerre, les valeureux tankistes ont encore longtemps fait les frais de l’esprit ségrégationniste régnant en Amérique.

La reconnaissance de la Nation s’est fait attendre. Ce n’est qu’en 1978 que le Président Carter accorda enfin la récompense suprême à ce 761st Black PantherTank Bataillon dont le destin restera à jamais lié à celui de notre commune.